Risibles amours est un recueil de 7 nouvelles, direct c'est le genre de format que je n'affectionne pas du tout, c'est comme les courts-métrages j'arrive pas à me plonger là-dedans, crache moi un bon vieux Zola de 12 000 pages avec 60 pages de description d'un clou rouillé et là ça va bander sec mais non le format nouvelle c'est frustrant comme quand Dutroux veut fumer après l'amour et que sa petite copine a même pas le droit d'aller lui chercher des clopes au tabac.
Kundera a vécu la guerre froide du côté glaçon: en Tchécoslovaquie! Les mecs étaient tellement aux anges de vivre dans le paradis du prolétariat qu'ils ont même essayés d'instaurer un socialisme à visage humain en 1968, c'est là qu'on se dit qu'un printemps à Prague n'est pas vraiment festif sans la présence des T34 soviétiques. Bref Brejnev a vite sifflé la fin de la récré démocratique et même le happening de Jan Palach n'arrivera pas à rallumer la flamme de l'amitié entre les peuples frères. Toute l'oeuvre de Kundera est marqué par cette "révolution" manquée et le climat suspicieux qui régnait à l'époque de l'autre côté du rideau de fer. Les états satellites de l'URSS sous la patte virile de l'ours russe ont chacun tentés leur petite dictature folklorique. La Tchécoslovaquie n'y a pas échappé. De la naissance à la mort, tes voisins, tes amis d'école, tes collègues... tout le monde t'épie pour savoir si tu suis bien le sentier lumineux qui mène aux lendemains qui chantent. Et attention à la gueule de bois car on dénonce n'importe qui pour n'importe quoi en voulant prendre de vitesse une éventuelle dénonciation contre soi et ainsi prouver préventivement sa loyauté au régime.
Pour Kundera se pose la question de comment vivre normalement dans une société folle, comment ne pas considérer sa propre vie comme un mauvais rôle dans une tragédie schizophrène. Les voisins qui disparaissent pendant quelques années pour une rééducation discrète, les amis qui sabordent leurs amitiés pour obtenir un passe-droit modeste ou pour obtenir un oeil bienveillant de la part de l'administration qui dirige dans les moindres détails la vie quotidienne. Comment croire que cette vie et cette société ne sont pas un mauvais sketch aux conséquences souvent brutales et cruelles.
Dans ces livres, il nous montre toujours que les personnages doivent à tout moment jouer un rôle devant les autres, ne jamais laisser déborder d'émotions qui pourraient être considérées comme bourgeoise, pro-impérialiste ou contre-révolutionnaire. Le non-sens de ces "démocraties populaires" a longtemps joué sur l'auteur qui se retrouve bloqué dans un labyrinthe intellectuel parsemé de cynisme.
L'amour est un thème majeur chez lui et bien évidemment il est aussi classifié par les organes du Parti. Le marasme créé par cette situation le pousse à rejeter le romantisme. Kundera parle des transformations que les hommes font pour paraître en être d'autres, de ce for intérieur si malléable à l'environnement extérieur. Dans les 7 nouvelles écrites ici, il livre le portrait d'hommes et de femmes vivant dans le stalinisme tardif de la Tchécoslovaquie. Là où les comités font la loi, te poussant à l'auto-critique humiliante si tu veux avoir une chance d'obtenir une datcha pour les vacances d'été. Dans cet univers, les joutes amoureuses sont autant de combats où chacun cherche à sauvegarder son intégrité quitte à se jouer des autres pour y arriver. Rien n'est gratuit dans le monde, surtout pas dans celui des soviets.
Kundera est aussi touché par l'image que l'on donne de soi et les personnages sont obnubilés par leur jeunesse ou leur vieillesse, par ces années qui passent en salissant le corps, en détruisant petit à petit le potentiel érotique de leur être. La réputation, l'estime de soi, ces valeurs qui touchent toujours au regard des autres se retrouvent encore dans ces lignes. Chaque personnage joue un rôle, se jouant par la même occasion de lui même. Triste spectacle dans un triste décor.
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