8.27.2018

Les vacances? Le fascisme? Finito!

C'est la rentrée du blog, littérature et points de souture, les bases de la vie. Sur la plage ou dans la street, la cred' va clairement à ceux qu'ont des bouquins sous le bras et des poings amerloques qui déforment les poches. L'idiocratie actuelle voudrait nous faire croire que le marasme ambiant est la coolitude ultime alors que chaque livre que tu lis est une putain d'arme contre ce monde médiocre. Lis ce que tu veux, fais ta révolution intérieure. 

Canal Mussolini Antonio Pennacchi (2010).


  Grosse fresque familiale sur les Peruzzi, famille de 17 frères et soeurs, bah ouais ça ovule sec dans l'Italie des années 20.  La botte a cette époque c'est le tiers-monde, vase clos caniculaire sous ambiance féodale, autant te dire que ça ricane moyen pour les descendants de l'Empire. 

Le livre nous narre l'histoire de plusieurs personnages qui vont traverser la période des années 20 jusqu'à la fin de la deuxième guerre mondiale et sans spoiler je peux dire que ça se conclut moyennement par une victoire éclatante des italiens. Le nombre de protagonistes portent parfois à confusion alors l'auteur en privilégie quelques uns, ceux dont la street cred' va amener un peu d'animation dans la vie de toute la fratrie. Au début on assiste donc au quotidien des paysans du début du siècle réglé par des potentats locaux où la vie des pauvres vaut que dalle, c'est ce climat misérable qui a entraîné la grande émigration aux Etats-Unis et qui fera ensuite le bonheur des amateurs de films de gangsters.

 Les Peruzzi eux restent en Italie, ça bosse plus que Stakhanov dans la poussière des champs mais cette époque est aussi le début des idées modernes et les places des villages se retrouvent souvent transformées en rings par des agitateurs qui ont la bonne idée de pas trop kiffer la vibe de l'oppression. C'est au cours d'une de ces rixes que les Peruzzi vont se retrouver à cotoyer plusieurs révoltés dont un certain Benito Mussolini, à l'époque c'est un des tribuns du socialisme coup de poing et par la force des choses toute la famille devient les srabs de l'agitateur. L'époque allant un peu vite, Benito se retrouve vite à être aux commandes de l'Italie et il instaure le régime fasciste dès 1922 car le socialisme des soviets le faisait moins kiffer, les Peruzzi vont devenir bien fanzouz du fascisme et participeront à l'émigration intérieure, vaste déplacement de population et programme de valorisation du sud de l'Italie, région marécageuse et abandonnée que le Duce veut transformer en lunapark pour colons en chemises noires. Le canal Mussolini c'est justement un de ces travaux titanesques qui doivent rendre la grandeur à l'Italie perdue depuis la chute de l'Empire et la mort de Goscinny. 

L'histoire de l'Italie fasciste des années 20/30 est relativement peu connue et le bouquin retranscrit bien ce qui pousse le clampin moyen à suivre fanatiquement le chemin tracé par le Duce. Les errements et contradictions sont habilement noyés par la dictature naissante et l'Italie se rêve alors en Empire libérateur, schizophrénie puissance 1000 de toute une population où toute opposition est invisible grâce au totalitarisme, le fascisme s'immisce dans tous les aspects de la vie et cela satisfait totalement les Peruzzi qui deviennent enfin les propres acteurs de leur destinée. Entre vies personnelles et ambitions nationales les situations nous montrent le quotidien au temps du faisceau.

L'auteur nous pose donc ici sa fresque familiale intimement liée au régime qui profitera puis sombrera calquant son destin sur celui du Duce et de sa clique perdus dans la violence de la deuxième guerre mondiale et la chute des utopies. Une lecture intéressante.

Le long voyage à travers le fascisme Ruggero Zangrandi (1962)


   Ok on est dans une soirée à thème? donc ça va être Casapound à tous les étages? J'y peux rien si après avoir lu le précédent bouquin je suis tombé sur celui là chez mon bouquiniste, Ruggero Zangrandi a été un des srab de Vittorio Mussolini le fils de qui vous savez et de sa prime jeunesse à 1939 il sera un fasciste idéaliste. Ce bouquin est un témoignage sur l'époque révolutionnaire du début du régime. 

La fougue d'une jeunesse exaltée qui veut faire sa propre révolution sans se soucier des autres régimes honnis et de la politique à l'ancienne, véritable sclérose qui immobilise la vie politique italienne depuis des plombes et qui participe à la stagnation de l'Italie. Mais comme dans toutes les dictatures il y a un pas de l'oie entre la propagande et les serments faits au rythme des tambours sous les bannières brodées qui flottent au vent et la réalité d'un régime violent géré par de simples hommes pétris de contradictions et bien souvent peu scrupuleux de trahir l'idéal au profit de leurs misérables profits personnels. 

Zangrandi fera partie des clubs universitaires qui donneront toute leur intelligence et leur volonté d'un monde nouveau au profit du fascisme. Mais les chantages, les tromperies, les concessions faites par le régime le rattraperont et dos au mur il devra choisir s'il continue à participer à cette fumisterie où s'il doit suivre son coeur et s'engager dans un combat contre ce qu'il a toujours représenté. 

On suit donc ici le cheminement idéologique et politique d'un jeune qui osera chercher des réponses à son questionnement intellectuel. Sa vision idéaliste d'un fascisme universel se transformera progressivement en un combat contre le fascisme et pour éviter le plus possible le désastre qui s'annonce. A travers sa vie, Zangrandi nous montre le fascisme vu de l'intérieur, il montre le rôle de l'église, des syndicats, des magistrats, des écrivains, des journalistes, de tous ceux qui auraient pu mettre un frein à cette fuite en avant amorcée par Mussolini. Il explique comment ce sont crées des groupes antifascistes en Italie, réprimées impitoyablement, comment le régime a réussi à pousser sa population à le suivre dans cette aventure tragique.

 Fondateur en 1939 du Parti révolutionnaire italien (qui fusionnera avec le parti communiste après la guerre) il sera arrêté en 1942 et déporté à Berlin. Le livre est super intéressant car l'auteur ne cherche pas à se dédouaner ou à trouver une palette d'excuses pour ces agissements au profit du fascisme, il a cru comme beaucoup d'autres à la vitalité du nouveau régime et à penser qu'il allait bâtir cet ordre nouveau si fantasmé. Ce témoignage nous montre les errements de cette génération perdue.

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